Droit de l’entreprise

Filtrage des investissements étrangers directs – Synthèse du rapport annuel du SPF Economie

Date de publication

3 octobre 2024

Le rapport annuel (2023-2024) du SPF Economie, P.M.E., Classes moyennes et Energie (ci-après « SPF Économie ») quant au filtrage des investissements étrangers directs a été publié ce lundi 30 septembre 2024.

Pour rappel, le 10 avril 2019 est entré en vigueur le règlement (UE) 2019/452 du Parlement Européen et du Conseil du 19 mars 2019 établissant un cadre pour le filtrage des investissements directs étrangers dans l’Union européenne. L’objectif de cette nouvelle réglementation est de renforcer la coopération entre les États membres et la Commission européenne afin de contrôler les investissements dans des secteurs sensibles de l’Union européenne.

Le rôle du SPF Économie ici est de réguler le marché tout en accompagnant les entreprises. L’enjeu est de réussir à attirer des capitaux étrangers favorisant la croissance et l’innovation, tout en évitant que l’économie du pays ne devienne dépendante de dynamiques géopolitiques potentiellement préjudiciables.

Ce rapport annuel démontre que la Belgique participe activement à l’examen des investissements étrangers, en évaluant leur potentiel risque pour la sécurité nationale et les intérêts stratégiques du pays en présentant un aperçu détaillé des mesures mises en place.

Les résultats de la première année du mécanisme de filtrage belge sont les suivants :

  • Un montant total estimé à 2,06 milliards d’euros investi en Belgique,
  • 43 % des investissements proviennent des États-Unis,
  • Les principaux secteurs concernés incluent les données, la santé, et les infrastructures numériques.

Mais quels sont les types d’investissements concernés ? 

Les investissements soumis à ce filtrage concernent toute personne ou entité dont le siège est situé en dehors de l’Union européenne. Les entreprises européennes elles-mêmes peuvent être soumises à ce régime si un bénéficiaire final réside en dehors de l’UE.

Processus de notification et filtrage des investissements :

Quels sont les critères et le champ d’application pour la notification des investissements étrangers ?

  1. La première question à se poser est de savoir si l’investissement se fait dans une entreprise ou une entité belge. Dans la négative, l’investissement ne doit pas être notifié.
  • A contrario, dans l’affirmative il est nécessaire de se poser la question de savoir si l’investissement est réalisé par un investissement étranger. Encore une fois, si la réponse est non, la notification n’a pas lieu.
  • Dans le cas contraire, il faut se demander si l’entreprise ou l’entité belge est active dans un secteur mentionné à l’article 4, § 2 de l’accord de coopération[1] (à savoir : si l’investissement directs étrangers sont considérés comme des investissements  qui donnent lieu, directement ou indirectement, à l’acquisition d’au moins 10% des droits de vote dans des entreprises établies en Belgique et dont les activités sont liées aux secteurs de la défense, y compris les produits à double usage, de l’énergie, de la cybersécurité, des communications électroniques ou des infrastructures numériques, et dont le chiffre d’affaires annuel au cours de l’exercice précédant l’acquisition d’au moins 10% des droits de vote était supérieur à 100 millions d’euros ; ou donnent lieu, directement ou indirectement, à l’acquisition d’au moins 25% des droits de vote dans des sociétés ou entités établies en Belgique et dont les activités concernent infrastructures critiques, pour l’énergie, les transports, l’eau, la santé, les communications électroniques et les infrastructures numériques, les médias, le traitement ou le stockage des données, l’aérospatiale et la défense, les infrastructures électorales ou financières, et les installations sensibles, ainsi que les terrains et les biens immobiliers essentiels à l’utilisation de ces infrastructures) ? Si ce n’est pas le cas, aucune raison de procéder à la notification.
  • Dans l’affirmative, une dernière question se pose : l’investisseur acquiert-il le contrôle ou au moins 10 % ou 25% des droits de vote de l’entreprise ou de l’entité. Si la réponse est positive,  l’investissement doit être notifié.

Ensuite, concernant le filtrage des dossiers notifiés, ce dernier se déroule de la manière suivante :

  1. L’investisseur étranger notifie au secrétariat du Comité de filtrage interfédéral[2] (ci-après le « CFI ») l’investissement,
  2. Une vérification de la complétude du dossier s’opère,
  3. Les membres du CFI compétents vérifient s’il existe des indices pour lesquelles l’investissement peut constituer une menace pour l’ordre public, la sécurité nationale ou les intérêts stratégiques,
  4. S’il n’y a aucun indice, l’investissement est admis,
  5. Dans le cas contraire, les membres compétents poursuivent l’examen et soumettent chacun un avis aux ministres compétents de leur niveau de compétence : Sur la base des avis, les ministres compétents prennent une décision provisoire sur l’admissibilité de l’investissement,
  6. La décision provisoire se transforme en une décision combinée qui peut aboutir à :
  7. Une décision positive : investissement admis,
  8. Une décision positive avec des mesures correctives : investissement admis sous conditions,
  9. Une décision négative : investissement non admis.

A noter que la Commission européenne a proposé en janvier 2024 des améliorations à la réglementation de 2019 pour combler certaines lacunes identifiées, notamment en harmonisant les règles de filtrage au niveau européen et en élargissant le champ d’application à des investisseurs européens ayant des liens avec des pays tiers.

Le mécanisme belge de filtrage sera évalué à la lumière de ces nouvelles dispositions une fois que le nouveau règlement sera finalisé.

Affaire à suivre donc ! Et nous ne manquerons pas de vous en informer par ici.

Evelyne Liégeois

Avocate

evelyne.liegeois@moov.law

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Pour une lecture plus approfondie, vous trouverez le rapport complet sous ce lien : Filtrage des investissements étrangers directs – Rapport annuel 2023-2024 | SPF Economie (fgov.be)

Vous trouverez également sous cet autre lien, les formulaires de notification ainsi que les lignes directrices sur le screening des investissements directs étrangers : Comité de filtrage interfédéral | SPF Economie (fgov.be)


[1] Cet accord de coopération du 30 novembre 2022 s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre du Règlement (UE) 2019/452 du Parlement européen et du Conseil du 19 mars 2019 et vise à renforcer la sécurité économique en filtrant les investissements directs étrangers (IDE) dans des secteurs sensibles. Il a été conclu entre plusieurs entités belges, incluant l’État fédéral, les régions, et les communautés, afin de coordonner les efforts dans ce domaine.

[2]  Le SPF Economie assure le secrétariat du CFI qui a un rôle administratif et de coordination tout au long de la procédure. Le secrétariat du CFI fait également office de point de contact pour la Belgique dans le cadre du mécanisme de coopération de l’UE.

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